Fiscalité
Réforme du courtage retoquée : les réactions des associations
- Vendredi 17 mai 2019 - 08:52
- | Par Gestion de Fortune
Le Conseil constitutionnel a censuré l'article de la loi Pacte sur l'autorégulation du courtage en assurance et en crédit. Les associations de CIF n'avaient pourtant pas ménagé leurs efforts pour être prêtes.
Partie remise pour la réforme du courtage ! Le Conseil constitutionnel a retoqué ce jeudi 16 mai 2019 l’article 207 de la loi Pacte (voir ci-dessous) qui prévoyait la création d’associations représentatives à adhésion obligatoire pour les courtiers en assurances (à horizon 2020) et les courtiers en crédits à horizon 2021 (=> voir le communiqué du Conseil constitutionnel)
Cavalier législatif
Le Conseil constitutionnel a censuré une quinzaine d’articles qui « n’avaient pas leur place », a commenté Bruno Le Maire, ministre des Finances et de l'Economie dans un communiqué. De fait, cette réforme, dont l’idée remonte à l’été 2018, a été intégrée début 2019 dans la loi Pacte votée le 11 avril. Les sénateurs avaient d’ailleurs rajouté dans le texte les courtiers en crédit (IOBSP), ce qui n’était prévu initialement.
Une surprise
Cet article retoqué est une surprise pour les quatre associations de CIF (Anacofi, CNCGP, CNCIF et Compagnie des CGP-CIF) et les associations de courtage en assurance (Planète Courtier et CSCA) qui n’ont pas ménagé leurs efforts pour relever ce défi majeur de la réforme du courtage : celui-ci prévoyait d'obliger les quelque 24 000 courtiers en assurance et leurs 22 000 mandataires - ainsi qu'un an plus tard, les quelque 30 000 courtiers en crédit - à adhérer à une association professionnelle.
Les associations de CIF, dont une très large majorité des membres sont également des courtiers en assurance vie, s'étaient toutes positionnées comme candidate à l'agrément qui devait être délivré par l'ACPR au début de l'automne 2019.
De nombreuses réunions à Bercy
Il y a encore quelques jours, les associations candidates ont eu une réunion à Bercy avec la Direction générale du Trésor - la 6e ou 7e depuis le début - pour travailler sur le projet de décret de cette réforme.
Julien Séraqui, président de la CNCGP, a été l'un des premiers à réagir sur Twitter en écrivant : « Décision pleine de bon sens qui laissera à la profession le temps de s’organiser si le sujet revient sur la table plus tard ». Dans un communiqué, il ajoute : « Le report probable de la réforme sera mis à profit par la CNCGP pour continuer à préparer ses futures missions. La CNCGP poursuit ses travaux avec la Direction générale du Trésor afin de trouver les solutions les plus équilibrées possibles en faveur des courtiers et des IOB ciblés par la réforme censurée ».
Quel est le plan B ?
Pour Stéphane Fantuz, président de la CNCIF, qui projette de créer une association dédiée au courtage la CNCIAS, « Cette décision crée un coup de frein brutal alors que nous étions dans un élan, nous y avons investi beaucoup d'énergie du fait du timing serré. Nous restons profondément favorable à cette réforme. Nous avons maintenant des attentes fortes pour avoir rapidement la confirmation du maintien du projet et quel est le "plan B" ? "
De son côté, David Charlet, président de l'Anacofi, nous a confié : « Cette décision du conseil constitutionnel est une surprise. On peut imaginer que le projet n'est pas mort car cela ne remet pas en cause le fond de la réforme. Aujourd'hui, nous attendons la position du Trésor ».
Interrogé plus globalement sur la réforme, il indique : « L'Anacofi était sans doute la structure la plus prête pour cette réforme - que nous n'avions d'ailleurs pas demandé -, d'abord parce que nous dépassons le seuil de représentativité de 10 % des professionnels dans chacun des métiers (50 % des CIF, 10 % des courtiers en assurance et 30 à 35 % des IOB) et ensuite parce que nous avions développé les outils en tant que co-régulateurs CIF, commencé à recruter, à faire des travaux dans notre siège social, etc. Et même dans ces conditions, nous avions conscience des délais très courts. Nous continuons à recruter et monter en puissance. Nous serons prêts si ce projet n'est que reporté et, en attendant, les adhérents bénéficieront d'un service amélioré ».
Une autre accroche législative ?
Quant à la CSCA, « Nous déplorons la décision du Conseil constitutionnel car nous considérons que c’est un bon projet de réforme, nous déclare Bertrand de Surmont, président du syndicat qui va fusionner en juin avec Planète Courtier. Mais d’un mal, naît un bien. Cela nous permettra de desserrer l’étau qui nous contraignait en termes de temps. Je pense que les pouvoirs publics trouveront une autre accroche législative ».
Un délai bienvenu selon lui : « Sur cette réforme, il nous reste encore des points à négocier avec le Trésor, notamment sur la profondeur des missions de service public qu’auront à effectuer les associations. Nous voulons veiller à ce que les associations ne deviennent pas le « bras armé » de l’ACPR, en matière de contrôle notamment. Outre cette question de fond, il faut être conscient qu’en termes d’organisation, on passerait à un processus industriel très lourd et coûteux. Car si les associations de CIF par exemple régulent au maximum 2 à 3 000 adhérents, pour les courtiers en assurance, avec 27 000 entreprises et leurs 50 000 collaborateurs, les masses à traiter ne sont plus du tout les mêmes !»
La réforme pourrait revenir dans un autre véhicule législatif, mais les délais prévus (agrément des associations à l'automne et échéance du 1er janvier 2020 pour l'adhésion obligatoire des courtiers en assurance) paraissent très difficile à tenir.
Carole Molé-Genlis
Article mis à jour le 17/05 à 18 h
*L’article 207 de la loi Pacte prévoyait : « Aux fins de leur immatriculation au registre mentionné au I de l’article L. 512-1, les courtiers d’assurances ou de réassurance, personnes physiques et sociétés immatriculées au registre du commerce et des sociétés pour l’activité de courtage d’assurances, et leurs mandataires, personnes physiques non salariées et personnes morales, adhèrent à une association professionnelle représentative chargée du suivi de l’activité, de l’accompagnement de ses membres et de la défense de leurs intérêts. Cette association professionnelle exerce notamment des missions en matière de médiation, de capacité et de formation professionnelles, de vérification des conditions d’accès à l’activité, d’accompagnement et de vigilance en matière d’exercice de l’activité et dispose d’un pouvoir disciplinaire sur ses membres. À cette fin, les associations se dotent de procédures écrites ».