12122024

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Actualité des sociétés

Déceler les opportunités ignorées par le marché

CHARLES MONOT

Interview de Charles Monot - Gérant du fonds et co-fondateur de Monocle AM.

 

Co-Fondateur de Monocle AM, vous n’en êtes pas à votre première création d’entreprise. Comment êtes- vous venu à la gestion d’actifs ?
En effet, Monocle Asset Management n’est pas ma première initiative entrepreneuriale. Après un début de carrière dans la finance chez PaineWebber et Smith Barney, j’ai créé une première entreprise, ICY Software, qui concevait des logiciels de gestion de stratégies sur options de change. C’est suite à la vente d’actifs industriels familiaux et quelques essais non concluants avec des banques privées à qui nous avions confié les produits de cette vente que j’ai décidé de créer un family office ad hoc, Iceberg Finance, qui s’est peu à peu ouvert à d’autres patrimoines.

Que s’est-il passé ensuite ?
Avec le retour de la volatilité en 2008, nous avons pris conscience de la pertinence d’un véhicule d’investissement commun, patrimonial et flexible, pour l’ensemble des clients du family office. C’est ainsi que la première version du fonds Monocle a vu le jour avec pour objectif double de protéger le capital confié et d’accroître le pouvoir d’achat de nos clients. Après avoir, dans un premier temps, eu recours à la multigestion, le fonds a trouvé sa forme actuelle en 2015, date à laquelle nous avons fait évoluer son processus de gestion pour nous consacrer pleinement à la gestion d’actifs en direct.

Pourquoi avoir renoncé à la multigestion ?
Cette décision trouve son origine dans l’affaire Volkswagen. L’annonce, relayée par les médias, d’une amende record initiale de 18 milliards de dollars a fait plonger les cours de bourse du constructeur automobile allemand. Nous étions alors investis dans deux fonds qui détenaient des titres Volkswagen. Curieux de nature, j’ai recherché et trouvé les textes de loi américains en lien avec la situation pour découvrir, au travers de la lecture d’une vingtaine de pages, que des dégressivités s’appliqueraient et qu’en conséquence l’amende du groupe allemand serait très substantiellement inférieure au chiffre évoqué. J’ai soumis mes recherches aux gérants qui n’ont pas manifesté d’intérêt pour l’information. Nous avons alors retiré l’ensemble de nos avoirs et avons mobilisé une partie de ce capital pour investir dans Volkswagen. Nous avons ainsi bénéficié d’une réappréciation du titre de l’ordre de 20 % en trois mois. Cet exemple résume assez bien nos exigences en matière de gestion d’actifs.

Comment caractérisez-vous votre approche ?
Nous avons retenu une devise, « we look closer », qui témoigne de notre volonté de déceler des opportunités ignorées par le marché. La recherche est et restera donc au coeur de notre démarche. Trop souvent, certains gérants, affairés à la commercialisation de leur fonds, négligent la gestion et la recherche de performances. Notre stratégie consiste à travailler suffisamment pour être parfaitement à l’aise avec les positions qui sont prises dans le portefeuille. Il en résulte que nous ne sommes investis que lorsque nous identifions une anomalie manifeste dans la valorisation d’un titre comme cela a été le cas avec Volkswagen. Pour l’anecdote, nous avons détecté un nouveau mispricing sur le titre quelques mois après l’opération mentionnée plus haut, ce qui nous a permis de reprendre position avec le même succès. En résumé, Monocle Fund est une combinaison, gérée en continu, de nos plus fortes convictions du moment.

Quelle allocation d’actifs avez-vous retenue ?
Structurellement, le fonds est investi à hauteur de 51 % minimum dans des produits obligataires et donc à hauteur de 49 % maximum en actions. La poche obligataire est actuellement composée d‘emprunts d’Etat de haute qualité et de courte maturité qui constituent des placements sans risque faute de réelles opportunités sur les marchés de taux. Sur ce segment, comme sur les actions, nous n’investissons que lorsqu’une vraie opportunité se présente.

Et qu’en est-il de la poche actions ?
Il s’agit d’un portefeuille concentré autour d’une dizaine de valeurs1, sélectionnées parmi différentes tailles de capitalisations en Europe et aux Etats-Unis. Nous ne retenons que celles dont le potentiel de hausse est égal ou supérieur à 20 %. Parmi les principales lignes détenues en portefeuille au premier semestre de cette année, on peut mentionner Pfizer pour les perspectives, Orange pour le rendement ou encore Facebook qui reste abordable, parmi ses pairs, en termes de multiples de valorisation.

Quelles ont été vos performances ?
Depuis la création du fonds il y a six ans, notre mode opératoire nous a permis d’obtenir de bonnes performances. Cela dit, notre approche, par nature prudente et axée sur la valeur, permet surtout de générer de la surperformance dans les marchés difficiles or ceux-ci ont été plutôt rares ces dernières années alors que les flux et un optimisme sans doute exagéré orientaient les marchés. Nous préférons privilégier la sérénité et, dans ce cadre, nous sommes parfaitement armés pour faire face aux marchés plus difficiles qui ne manqueront pas de survenir. Nous sommes en effet convaincus qu’une bulle est en formation. Les PE de Shiller2 sont actuellement à des niveaux comparables à ceux observés en 1929 et en 2000.

Comment est aujourd’hui structurée l’équipe de gestion ?
Ma collaboratrice, Mimoza Bogeska, co-gère le fonds avec moi depuis son lancement. Nos approches sont complémentaires. En combinant nos compétences respectives pour sélectionner les titres, nous appréhendons les différents dossiers avec rigueur, sous différents angles. Depuis le 1er juillet dernier, nous sommes épaulés dans notre mission par Pierre Michaud et par Maximilien Monot, mon fils, tous deux analystes gérants.

Vous étoffez également les autres services de l’entreprise ?
Oui, Fantine Monot, ma fille est, depuis l’an dernier, en charge du développement de l’entreprise. Philippe Christel a quant à lui pris la direction administrative et financière de la société depuis cet été.

Comptez-vous également développer votre offre de fonds ?
Nous gérons actuellement deux fonds : notre fonds patrimonial Monocle Fund et un second qui réplique la poche actions du premier et que nous souhaitons convertir prochainement en fonds UCITS afin de le proposer à la souscription aux épargnants français.

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1. Les lignes sont concentrées dans le respect des limites réglementaires.
2. Rapport de la capitalisation boursière par la moyenne sur 10 ans du résultat net ajusté de l’inflation.

Thierry Bisaga