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Des Etats membres veulent créer un label d’épargne européen
- Jeudi 5 juin 2025 - 11:57
- | Par Jonathan Blondelet
Alors que des flux conséquents s’exportent hors du continent, dix États membres s’unissent pour poser les bases d’un futur label orienté vers la transition et la souveraineté économique. Au menu : actions européennes et temps long.
L’Union de l’épargne et de l’investissement (UES) est encore en gestation, mais des Etats membres veulent accélérer la cadence. Dix grandes économies européennes, dont la France, l’Espagne, le Luxembourg, les Pays-Bas, le Portugal se réunissent le 4 juin pour initier les travaux sur un futur label d’épargne européen.
Le rendez-vous doit déboucher sur la signature d’une charte de lancement de « Finance Europe ». Bien qu’organisé à Bercy, le projet s’inscrit dans le cadre du « Laboratoire européen de Compétitivité », lancé par Carlos Cuerpo, ministre de l’Économie, du Commerce et de l’Entreprise d’Espagne.
Recentrage
« Dans un climat de concurrence internationale exacerbée, notre épargne européenne doit servir au développement économique de nos entreprises, à la création d'emploi et à la réponse aux grands défis environnementaux ou technologiques, a déclaré le ministre de l’Economie et des finances Eric Lombard. Or depuis trop longtemps, les 35 000 Md€ épargnés par les européens s'exportent en grande partie pour financer l'innovation et la croissance ailleurs. Trop de nos entreprises, start-up, ETI, quand elles atteignent certains niveaux de besoins en financement, ne trouvent pas de réponse en Europe. »
L’ambition de ce label est d’orienter les 24 000 Md€ d’épargne européenne dite « improductive » vers les investissements promus par l’UES, centrés sur la transition écologique et numérique ainsi que les infrastructures critiques.
Objectif 800 Md€
Face à l’attitude commerciale des Etats-Unis, les pays européens veulent colmater les fuites de capitaux pour recentrer l’épargne sur des entreprises du cru. Objectif : 800 Md€ d’ici 2030. Mais détourner les masses des ETF basés sur des indices américains, en perpétuelle progression, ne sera pas chose aisée.
Pour créer une dynamique d’investissement long terme au service des entreprises européennes, le label imposera que l’actif du portefeuille soit communautaire à 70 % minimum et que l’épargne soit immobilisée pendant au moins cinq ans. Les produits devront être majoritairement composés d’actions pour contribuer aux fonds propres des valeurs présentes en portefeuille, mais Bercy précise qu’il sera possible d’y loger également des obligations ou du non coté.
« Un tiers de l’épargne européenne seulement est orientée vers des actions ou des parts de fonds, contre 50 % aux Etats-Unis », fait-on remarquer au ministère.
Orienter plutôt que créer
Le label Finance Europe ne vise pas spécifiquement à créer de nouveaux produits financiers, mais plutôt à faire office de boussole pour certaines offres. Des fonds pourront être labélisés, mais aussi des assurances vie ou d’autres produits d’épargne. L’exécutif veut cependant garder un nombre très limité d’offres par pays : le label étant autoadministré par les acteurs financiers, l’administration devra veiller au grain.
Chaque pays participant choisira le régime fiscal qu’il juge le plus approprié, mais tous se sont engagés à choisir « l’un des plus attractifs et simples » au niveau national, assure Bercy.
Mauvais précédent
Si réduire la fragmentation des marchés financiers est un objectif affiché de l’Union européenne depuis 2014, l’échec retentissant du produit d’épargne retraite paneuropéen (PEPP) laisse douter du succès de ce futur label. Lancé en 2022, le produit qui se veut transnational n’a jamais su dépasser les disparités tarifaires et fiscales de chaque Etat.
Un véhicule législatif pour poser les jalons du label est en préparation, et les acteurs financiers en planifient la distribution. Les travaux démarrés le 4 juin vont se poursuivre jusqu’à la fin de l’année pour affiner les critères du label, en lien avec ceux de la Commission européenne sur l’UES.