21112024

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Loi de finances

Validité d’un testament : encore une évolution de la Cour de cassation

testament 410X200

Selon l'article 970 du code civil, le testament manuscrit qui n'est pas daté de la main du testateur n'est pas valable. Mais progressivement la Cour de cassation a fait évoluer sa position sur l’incidence des imperfections. En témoigne cette étonnante affaire.

 

Selon la jurisprudence (depuis Cass. 1ère civ. 10 mai 2007, n°05-14.366), lorsque le testament comporte une date dont un ou plusieurs éléments nécessaires pour la constituer ont été portés par un tiers, la nullité du document n'est pas encourue dès lors que des éléments intrinsèques à l'acte, éventuellement corroborés par des éléments extrinsèques, établissent :

1°) qu'il a été rédigé au cours d'une période déterminée


2°) qu'il n'est pas démontré qu'au cours de cette période, le testateur ait été frappé d'une incapacité de tester ou ait rédigé un testament révocatoire ou incompatible.


Dans cette affaire qui vient d’être jugée le 23 mai dernier, le fils, seul descendant, découvre que sa mère avait dans son testament fait un legs important à un tiers. Il constate en outre que le « 9 » de la date du « 26 mars 2009 » apposée sur le testament n’est pas de la main de sa mère. L’ovale du "9" de l'année "2009" correspondait à son écriture mais pas la jambe de ce chiffre. Ce vice formel suffit-il à en emporter la nullité ? Oui selon les juges de la cour d’appel qui estiment que « cette discordance pourrait signifier qu’il s’agit d’un 0 qu’une autre main a transformé en 9 par suite d’une erreur commise sur le chiffre de la date ».


Un formalisme atténué


La Cour de cassation censure, assouplissant une fois de plus le formalisme testamentaire. Car les juges du fond devaient « rechercher… si, en dépit de cette irrégularité, des éléments intrinsèques à l'acte, dont faisait partie la mention « 26 mars 200 » écrite de la main de la testatrice, éventuellement corroborés par des éléments extrinsèques, ne permettaient pas d'établir que le testament avait été rédigé au cours d'une période déterminée ».
La mention d'une partie de la date figurant sur le testament, écrite de la main du testateur, peut constituer un élément intrinsèque à l'acte.
On est loin du principe énoncé par la Cour de cassation : « Sur les 45 lignes que comptait le testament litigieux, seules les lignes 43, 44 et 45 et la signature étaient écrites de la main du testateur, les 42 premières lignes émanant d'un tiers, ce dont il résultait que le testament n'avait pas été entièrement écrit de la main du testateur » (Cass. civ. 1ère 20 septembre 2006, 04-20.614).
Là, la Cour de cassation estime que la date est incomplète et que des compléments d’information sont à rechercher pour sa validité, en l’espèce pour savoir si le testament de cette dame frappée d’insanité d’esprit avait été rédigée avant ou après qu’elle perde la raison. La cour de renvoi devra statuer entre étourderie et intervention d’un tiers (qui n’est pas forcément mal intentionné).

La Cour de cassation ne pousse-t-elle pas trop loin ?

(Cass. civ. 1ère 23 mai 2024, pourvoi n°22-17.127). Pour une analyse complète de l’évolution de la jurisprudence, cf. Gest. Fort. n°353 de janvier 2024, par Thomas Gimenez, de l’Aurep.

JDE