03102025

Retour

Fiscalité

Sanctions AMF : le Conseil constitutionnel consacre le droit de se taire

silence se taire chute

Le Conseil constitutionnel a jugé inconstitutionnelle la procédure de sanction de l’AMF en ce qu’elle ne prévoyait pas le droit de se taire des personnes mises en cause. La décision s’applique immédiatement et contraint le régulateur à adapter sa procédure.

 

 

 

 

Cette fois ce n’était pas une disposition qui était incriminée devant le Conseil constitutionnel, mais son absence. Le Conseil constitutionnel a jugé inconstitutionnelle la procédure de sanction devant l’AMF en ce qu’elle ne prévoit pas la possibilité de se taire pour la personne incriminée (1).

Principe constitutionnel

La question prioritaire de constitutionnalité (QPC) avait été introduite par la société Eurotitrisation, un programme de titrisation de prêts octroyés par les banques du groupe BPCE. Elle lui reprochait à la procédure de l’AMF de ne pas faire prévoir le droit de la personne concernée par la procédure de se taire « lorsqu’elle est entendue par la commission des sanctions de cette autorité, alors que ses déclarations sont susceptibles d’être utilisées à son encontre dans le cadre de cette procédure ».

Au mépris, selon elle, de l’article 9 de la Déclaration des droits de l’Homme et du citoyen, qui prévoit la présomption d’innocence. Aux termes de ces dispositions, nul n’est tenu de s’accuser. Un principe duquel découle le droit de se taire, cardinal devant les juridictions pénales « mais aussi à toute sanction ayant le caractère d’une punition », répond le Conseil constitutionnel.

Procédure silencieuse

Or, le Code monétaire et financier (CMF) prévoit qu’aucune sanction ne puisse être prononcée par l’AMF « sans que la personne concernée ou son représentant ait été entendu ou, à défaut, dûment appelé », mais pas que celle-ci soit informée du droit de se taire. « Lorsqu’elle est entendue par la commission des sanctions, la personne mise en cause peut être amenée, par ses déclarations, à reconnaître les manquements qui lui sont reprochés, développent les Sages. Le fait même d’être entendue peut lui laisser croire qu’elle ne dispose pas du droit de se taire ».

Le Conseil constitutionnel accueille ainsi favorablement la demande d’inconstitutionnalité d’Eurotitrisation et censure le passage concerné du CMF pour n’avoir pas prévu le droit de se taire, avec prise d’effet immédiat : les personnes sous le coup d’une procédure de sanction peuvent donc se prévaloir de la déclaration d’inconstitutionnalité depuis la publication de la décision, le 26 septembre. L’AMF devra, de son côté, adapter sa procédure pour prendre en compte cette exigence.

Une garantie supplémentaire « alignée sur les exigences européennes en matière de droits de la défense », indique l’avocate Pauline Dufourq sur LinkedIn. Selon elle, cette décision « pourrait inspirer d’autres autorités administratives indépendantes exerçant un pouvoir de sanction ».

(1) Décision n° 2025-1164 QPC du 26 septembre 2025