Fiscalité
[Tribune] L'intérêt des SAS à capital variable
- Jeudi 13 novembre 2025 - 10:24
- | Par Franck Ladrière, conseil fiscal à FL Audit & Expertise

Longtemps méconnu du grand public, le dispositif Girardin Agricole s’appuie sur un modèle juridique particulièrement adapté aux intérêts des contribuables : la SAS à capital variable. Explications sur un mécanisme qui allie souplesse juridique, sécurité fiscale et équité économique.
La SAS à capital variable, validé dès 2011 par Bercy, permet de financer des aménagements agricoles en Outre-mer tout en protégeant les deux parties : le contribuable, bénéficiaire de la réduction d’impôt, et l’agriculteur local, utilisateur des équipements.
Le dispositif Girardin Agricole, inscrit à l’article 199 undecies B du Code général des impôts, vise à soutenir le développement agricole dans les Outre-mer.
Depuis 2011, les projets éligibles sont réalisés exclusivement via des SAS à capital variable. Ce choix, loin d’être anodin, répond à un double objectif : permettre la souscription d’un nombre limité d’investisseurs dans un cadre privé et offrir une flexibilité statutaire essentielle pour des opérations à durée de vie courte (5 ans).
La variabilité du capital autorise l’entrée et la sortie des investisseurs sans formalités lourdes, tout en maintenant la continuité juridique de la société.
Chaque SAS est créée pour un projet agricole précis (piste, réseau d’irrigation avec planches de culture), limitant ainsi les risques et assurant une parfaite traçabilité des fonds.
Une structure transparente et contrôlée
Les statuts types de SAS encadrent strictement la répartition du capital, les pouvoirs du président, la durée de vie et les modalités de liquidation.
Les investisseurs sont des associés passifs, sans aucun rôle opérationnel, et leur responsabilité est limitée à leur apport initial.
Aucun appel de fonds supplémentaire n’est possible après la constitution, un point crucial de sécurité au regard des autres types de sociétés de portage proposés par les autres déclinaisons du dispositif Girardin.
Les fonds propres de la SAS servent exclusivement à financer les améliorations foncières temporaires, dont la valeur est intégralement justifiée et amortissable selon un cahier des charges strict.
Une fois les travaux réceptionnés, aucun flux financier n’intervient plus entre la société et l’agriculteur : tout est réglé par compensation comptable.
Une protection solide pour le contribuable
Pour le contribuable, la SAS à capital variable représente un cadre fiscalement sûr et juridiquement verrouillé.
Elle permet de bénéficier d’une réduction d’impôt immédiate (jusqu’à 40 900 € selon le double plafonnement 10 000 €/18 000 €) et de participer à des projets agricoles utiles dont l’éligibilité est validée par Bercy. Le tout, sans engagement ni gestion à long terme.
La responsabilité limitée garantit qu’aucune dette d’exploitation ne peut lui être imputée. De plus, sa participation est annulée automatiquement à la fin du cycle légal de 5 ans. Ce schéma a permis, depuis 2011, de financer plus de 1 000 projets indispensables au développement économique de la filière agricole, avec succès.
Un modèle protecteur et équitable pour l’agriculteur
Du côté de l’agriculteur, la SAS à capital variable constitue un partenaire solide : elle met à disposition une infrastructure financée par la défiscalisation sans peser sur sa trésorerie.
Grâce au mécanisme de rétrocession prévu par la loi, l’exploitant bénéficie d’une aide immédiatement utilisable pour financer son développement.
L’agriculteur devient ainsi acteur et non simple bénéficiaire : il exploite, entretient et valorise les aménagements, sans dépendre d’un bail complexe, d’un crédit bancaire contraignant ou d’un financement public aléatoire.
Cette approche a favorisé la structuration de nombreuses filières locales (maraîchage, arboriculture, élevage) et contribue à la souveraineté alimentaire guyanaise.
Un encadrement réglementaire strict pour les professionnels du conseil
La commercialisation du dispositif est strictement encadrée par la réglementation afin de garantir la conformité juridique et la protection des investisseurs.
Les contribuables sollicitent habituellement des conseillers en patrimoine habilités à présenter l’offre Girardin Agricole pour les assister dans la détermination du montant optimal de réduction Girardin à mobiliser au regard de leur situation fiscale prévisionnelle.
Attention, ces professionnels doivent se limiter à une activité d’intermédiation : ils informent et accompagnent leurs clients sans fournir de recommandations personnalisées ni de services régulés tels que le conseil en investissement. C’est l’opérateur spécialisé dont l’activité de monteur en avantages fiscaux outremer est réglementé par l’article 242 septies du Code général des impôts qui conserve l’entière responsabilité de la diffusion des documents d’information et de la gestion du processus de souscription des titres des SAS.
Le rôle des conseillers porte principalement sur le calcul des seuils d’éligibilité fiscale (article 199 undecies B et 200-0-A du CGI) et la préparation administrative du dossier de chaque contribuable.
Ce dispositif, conforme aux règles déontologiques des CGP et CIF, assure une séparation claire des rôles, une transparence totale vis-à-vis des contribuables et une sécurité juridique renforcée pour toutes les parties.
Une innovation juridique au service de la solidarité économique
Le choix du statut de SAS à capital variable est donc bien plus qu’une commodité technique : c’est une innovation juridique française au service du développement agricole ultramarin.
Il associe la rigueur du droit des sociétés, la clarté du régime fiscal des sociétés de personnes (article 239 B AB du CGI) et la transparence du contrôle comptable.
En mutualisant les risques et en garantissant la sécurité des deux parties, ce modèle innovant, conçu et développé par le pionnier du Girardin agricole, a su créer un écosystème vertueux : un montage fiscal utile, durable et conforme à la doctrine administrative.
Le modèle SAS, une référence de sécurité et de solidarité
En plus de 14 ans d’existence, le Girardin Agricole a prouvé qu’il était possible de concilier défiscalisation et impact réel sur le terrain.
La SAS à capital variable, pierre angulaire du dispositif, assure cette réussite : elle protège les investisseurs, responsabilise les agriculteurs et garantit la pérennité d’un mécanisme unique de financement solidaire.
Dans un contexte où la souveraineté alimentaire et la finance durable deviennent prioritaires, ce modèle juridique pourrait inspirer bien au-delà de la Guyane.


