22112024

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Assurance vie

Epargne Retraite : le Trésor explique la réforme du PER

L’AFG a organisé une conférence sur le nouveau Plan d’épargne retraite (PER), avec - c’est une première ! - la présence du sous-directeur des assurances au Trésor. Un éclairage intéressant sur les objectifs de la réforme, avec d’utiles précisions !

Dans son discours d’introduction de la conférence de l'Association française de la gestion financière (AFG), ce mardi 22 octobre 2019 (voir photo en fin d'article), Philippe Setbon, vice-président, a salué la réforme de l'épargne retraite, tout en faisant remarquer que l’essentiel du dispositif du PER s’inspire du Livre blanc de l’AFG consacré à l’épargne retraite et aux réformes souhaitées (paru en décembre 2016).

« Nous étions loin d’imaginer qu’un texte de loi, peu de temps après, reprendrait dans ses idées générales ce que nous proposions », a-t-il indiqué rajoutant que l’AFG soutient « à bout de bras » cette réforme parce que « pour la première fois, on a un texte qui s’intéresse à l’épargnant et à l’entreprise, donc aux retraites et au financement de l’économie. Ce n’est pas un énième texte, comme on a l’habitude de le voir en France, mettant en avant un booster d’orientation  de l’épargne à base de fiscalité ».

Philippe Setbon estime que cette réforme « structurante » est « un relais de croissance de long terme pour les asset managers », ce qui exigera aussi « un accompagnement des épargnants et de l’éducation financière ».

Il faut que les murailles tombent entre assureurs et assets

Ensuite, Lionel Corre, sous-directeur des assurances à la Direction générale du Trésor, a expliqué « avec enthousiasme » la réforme du PER. Il a d’abord souligné sa « présence en guise de symbole, pour que les murailles tombent » entre assureurs et asset managers, « ce qui est l’un des objectifs de la réforme » (puisque le PER peut aussi être proposé par les sociétés de gestion). « Il est temps, a-t-il insisté, de faire fi des querelles de chapelle au profit de notre objectif de politique publique », l’AFG et la FFA (absente de cette conférence) entretenant des relations tendues...

Il a commencé par un constat connu : dans la répartition des actifs financiers des Français, « il n’y a pas grand-chose investi en actions et à long terme ». Il a souligné le hiatus entre l’assurance vie avec « une duration moyenne de 12 ou 13 ans » et une épargne investie par les assureurs à court terme « avec une duration moyenne de 6 ans ». D’ailleurs, l’essentiel des placements dits de retraite (estimés à 230 Md€) l’est aussi sur des fonds en euros.

Repositionner l’épargne vers du long terme 

D’où un problème évident pour l’épargnant puisque les rendements sécuritaires sont devenus quasi nuls. D’où aussi un problème pour notre économie. « L’objectif est donc, dans l’intérêt de l’épargnant comme de l’économie, de repositionner l’épargne vers du long terme ». Le Trésor estime à environ 25% de l’encours d’assurance vie pour une optique de retraite, d’où l’idée d’une incitation fiscale, par le double de l’abattement sur la plus-value de rachat, à basculer vers un PER.

Lionel Corre a expliqué les objectifs de la réforme, à commencer par l’attractivité du dispositif, la flexibilité du PER avec notamment le choix rente ou capital, la transférabilité et - ce qui est un apport du débat parlementaire - la gestion pilotée par horizon du capital. Nous avons demandé à Lionel Corre pourquoi le Trésor et le Parlement n’ont pas souhaité plafonner les frais de distribution et de gestion pour ce produit tunnel  : « Le choix qui a été fait est celui de la transparence du commissionnement. Il y a des réseaux de distribution à rémunérer, il y a du conseil à rémunérer, les souscripteurs du PER doivent en être conscients, mais encore faut-il qu’ils le sachent. Cela dit, c’est un débat récurrent, donc nous aurons à faire un bilan des pratiques et de la bonne information des épargnants. Nous comptons aussi sur le jeu de la concurrence ».

Nous avons également interpelé le sous-directeur des assurances pour avoir son point sur l’idée d’utiliser le PER comme un super PEL. La question est à l’arbitrage entre le Trésor et la Direction générale des finances publiques, avec une réponse dans le prochain Bofip. « Nous, au Trésor, on veut le succès du produit, tout ce qui peut y contribuer est bienvenu, mais reconnaissez que le PER n’a pas été conçu pour être de l’épargne logement ».

En clair, cette solution devrait amener les services fiscaux à prendre position contre cette astuce, donc à remettre en cause la déduction fiscale. Le député Jean-Noël Barrot, vice-président de la commission des finances et professeur associé à HEC, a insisté sur l’intention de « mettre l’épargnant au cœur du financement de l’économie. Jusqu’à présent trop d’épargnants n’ont pas placé leur argent en fonction de leur intérêt, mais en fonction d’abord d’un avantage fiscal qui est plus facile à vendre qu’un couple rendement-risque. L’intérêt aujourd’hui, c’est de préparer la retraite », donc « l’avantage fiscal doit venir en aide à l’épargnant pour surmonter ses biais comportementaux, c’est-à-dire pour épargner sur le long terme ».

Quid des rétrocommissions

Jean-Noël Barrot a indiqué que « nous avons beaucoup, beaucoup, beaucoup (il le répète trois fois) discuté sur la question de rétrocommissions. La version définitive du texte instaure des obligations de transparence sur tous les frais, sans aller jusqu’à interdire les rétrocommissions comme cela a été le cas pour le Perp. Ceci étant dit, je pense que cette discussion sur le financement de la distribution des produits d’épargne retraite et d’assurance vie va certainement revenir sur la table ». Seuls les frais de transfert sont plafonnés. Xavier Collot, président de la Commission épargne salariale et épargne retraite de l’AFG et directeur de l'épargne salariale chez Amundi, a précisé, selon les premiers échos qu’il a eus, que « les entreprises devraient être très intéressées à l’idée de proposer à leurs salariés un socle d’épargne retraite comme nouvel avantage social ».

« C’est une vraie révolution parce que le retraite c’est la répartition et ce sera de plus en plus la capitalisation », a commenté quant à lui Julien Séraqui, Président de la Chambre nationale des conseils en gestion de patrimoine (CNCGP), qui a insisté sur le devoir de conseil pour ce nouveau produit.

Jean-Denis Errard


Conférérence de l'AFG sur l'épargne retraite du 22 octobre 2019
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