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Les saisines du médiateur de l’AMF liées aux SCPI et au crowdimmo ont doublé
- Lundi 10 juin 2024 - 10:00
- | Par Jonathan Blondelet
La conjoncture défavorable à l’immobilier de 2023 joue dans cette hausse, bien que ces dossiers représentent une portion congrue du total. Une tendance à la hausse se constate aussi du côté des cryptoactifs.
Si le rapport annuel du médiateur de l’AMF pour 2023 affiche un nombre de saisines stable, leur répartition a évolué au gré du contexte. 1 922 dossiers ont été reçus et 2 060 traités et clos, soit presque autant qu’en 2022. Le nombre de dossiers recevables en revanche (qui entrent dans le champ de compétence du médiateur) accuse une baisse de 1 341 à 1 129, de même que les propositions de solutions (828, -18 %).
En raison de la conjoncture immobilière défavorable, le nombre de litiges liés aux SCPI et au crowdfunding immobilier a doublé. Il faut cependant souligner que ces dossiers ne sont qu’au nombre de 107 et représentent moins d’un dixième du nombre de dossiers recevables.
Mauvaise compréhension des mécanismes de la SCPI
Pour les SCPI, il s’agit principalement de demandes liées aux délais d’exécution des rachats et de la dépréciation des parts. A en croire Marielle Cohen-Branche, médiateur de l’AMF, le tort incombe souvent aux épargnants qui comprennent mal les mécanismes de cette typologie d’actifs.
« S’agissant des SCPI, qu’elles soient à capital fixe ou variable, je dois surtout faire preuve de pédagogie sur le mode de fonctionnement et les conditions dans lesquelles les sociétés de gestion sont conduites non seulement à diminuer la valeur des parts (qui ne nécessite pas leur consentement, comme le croient parfois les investisseurs), mais surtout les raisons qui conduisent les porteurs, même s’ils sont régulièrement inscrits dans le registre chronologique des retraits, à devoir attendre pour obtenir le remboursement de la valeur des parts que d’autres investisseurs en aient acquises », écrit-elle dans le rapport.
A l’inverse, en ce qui concerne le « crowdimmo », la responsabilité incombe souvent aux plateformes. Les dossiers traités concernent plutôt des conseillers en investissement participatif (CIP), puisque ceux-ci ont bénéficié d’une période de transition jusqu’au 10 novembre 2023 avant de devoir définitivement adopter le régime européen de prestataire de services de financement participatif (PSFP).
Manque d’attention porté aux émetteurs en crowdimmo
Même si leur statut est moins exigeant que celui de PSFP, les CIP ont l’obligation d’informer les investisseurs sur les risques encourus en leur fournissant des informations claires, exactes et non trompeuses. Or, dans plusieurs dossiers traités, le médiateur a pu « régulièrement constater des lacunes importantes », notamment des présentations incomplètes et déséquilibrées des avantages et inconvénients des investissements.
« Tel était notamment le cas lorsque les plateformes évoquaient dans la documentation commerciale les sociétés porteuses de projet et leur santé financière de manière très élogieuse, minimisaient largement les risques associés au projet par rapport à ses avantages ou encore mettaient l’accent sur des sûretés inefficaces », charge Marielle Cohen-Branche.
Encore plus problématique, plusieurs plateformes n’ont pas réagi face à la dégradation de la situation financière des porteurs de projets – absence de mise en demeure, de mesures conservatoires, prorogation des emprunts sans analyse préalable… - en violation des contrats d’émission obligataire dont elles étaient porteuses.
La médiatrice a également « relevé les premiers déboires en matière de placements participatifs sous forme de titres », qui révèlent « une analyse des projets et une compétence qui laisse parfois à désirer de la part des plateformes ».
Augmentation des saisines liées aux cryptos
Côté cryptoactifs, 88 saisines ont été réalisées en 2023. Si ce chiffre a doublé depuis 2021 car plus de plateformes sont enregistrées auprès de l’AMF en tant que prestataire de services sur actifs numériques (PSAN), seuls 27 dossiers ont été considérés comme recevables. Cela tient plutôt à des questions de procédure qu’à la pertinence des demandes : les deux motifs d’irrecevabilité principaux sont l’absence d’enregistrement de l’entité de la plateforme auprès de l’AMF ou au fait que les faits sont susceptibles de constituer une escroquerie.
Un nouveau type de saisine a vu le jour en 2023, où des investisseurs ayant transféré des cryptoactifs hébergés auprès de leur Psan à des escrocs lui reproche un défaut de vigilance. « Les obligations de vigilance en matière de lutte contre le blanchiment et le financement du terrorisme (LCB-FT) sont envisagées comme la composante d’un moyen de protection de l’ordre public et non comme un régime de protection des intérêts particuliers de la clientèle », rappelle le médiateur.