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[Tribune] Non-coté : quelles performances pour le T2 2025 ?
- Lundi 17 novembre 2025 - 10:24
- | Par Olivier Herbout, cofondateur de Ramify

Au deuxième trimestre 2025, le Ramify Private Equity Index affiche une performance annualisée de 5,3 % (contre 5,8 % au trimestre précédent). Pour chaque profil de risque, un portefeuille type est rééquilibré tous les trimestres.
À l’origine conçu comme un outil interne pour structurer nos allocations en marchés privés, le Ramify Private Equity Index (RPEI) est rapidement devenu, depuis sa création, un indice de référence pour suivre la performance du private equity destiné aux particuliers en France. Nous en publions régulièrement les résultats afin d’offrir aux investisseurs et aux conseillers un suivi transparent du marché, facilitant ainsi l’analyse des tendances et l’optimisation des allocations dans un cadre rigoureux.
Dans cet article, nous vous proposons une analyse des performances du private equity pour les particuliers au deuxième trimestre 2025 à travers les données du RPEI. En résumé :
• Une performance globale légèrement négative à -0.4%, la première depuis la création de l’indice, principalement pénalisée par la dépréciation du dollar
• Le sous-indice fonds evergreen sous-performe l’indice RPEI global de 20 points de base, en raison de la baisse marquée de l’un de ses fonds sous-jacents (près de –16 %). En retirant ce fonds de l’univers d’étude, l’indice evergreen afficherait une surperformance de 1,3 %, illustrant clairement l’importance d’une due diligence approfondie lors de la construction de portefeuilles de fonds evergreen.
• Le segment de la dette privée demeure résilient, malgré les récents cas de fraude (Tricolor, First Brands…)
Une performance marquée par la dépréciation du dollar, mais des fondamentaux solides
Au deuxième trimestre 2025, le RPEI recule de 0,4 %, enregistrant sa première performance négative depuis sa création. Deux facteurs principaux expliquent ce repli :
• Facteur systémique : le 2 avril 2025, Donald Trump a proclamé le Liberation Day, annonçant la mise en place de droits de douane massifs sur une vaste part des pays du monde. Cette instabilité géopolitique a entraîné une dépréciation du dollar d’environ 9 % face à l’euro sur le trimestre. Le RPEI, valorisé en euros, en a mécaniquement souffert : plusieurs fonds majeurs composant l’indice présentent une exposition de 40 à 50 % aux États-Unis (notamment Five Arrows Private Equity Programme III et les millésimes Altaroc Odyssey 2021–2023).
• Facteur idiosyncrasique : le fonds de private equity immobilier evergreen Novaxia One, spécialisé dans la rénovation urbaine, a subi le refus de deux permis de construire pour des projets majeurs. Cette décision a conduit à une dévaluation des actifs concernés et à une performance de –15,67 % sur le trimestre. En excluant ce fonds, la performance du RPEI serait de –0,1 %.
Il convient de noter que ces turbulences politiques ont impacté la performance principalement via l’évolution des taux de change. Comme mentionné dans notre analyse du T4 2024, un sondage mené par Neuberger Berman en avril 2025, juste après le Liberation Day, auprès de plus de 100 gérants internationaux, a livré un message rassurant : près de 75 % d’entre eux ne prévoient aucun ajustement significatif des valorisations des sociétés en portefeuille à court terme, contrairement aux marchés cotés, souvent plus sensibles aux chocs macroéconomiques.
A titre de comparaison, sur la même période :
• Le marché actions, représenté par l’indice MSCI World (Net Total Return) enregistrent une performance de +11,5 % en dollars, dans un trimestre particulièrement volatil marqué par un drawdown de –10,5 % début avril, avant un fort rebond tiré par les valeurs technologiques. En euros, la performance ressort à +2,5 %, illustrant pleinement l’impact de la dépréciation du dollar sur les portefeuilles européens.
• Le marché obligataire, représenté par l’indice Bloomberg Global Aggregate Bonds, affiche une performance quasi stable à +0,1 %.
• Le marché des SCPI à capital variable, mesuré par l’indice RSCPI (Ramify SCPI Index), enregistre une progression de +1,1 %, traduisant une stabilisation du segment après le réajustement observé au premier trimestre.

Depuis son lancement en janvier 2022, le RPEI affiche une performance annualisée de 5,3 %, en légère baisse par rapport aux 5,8 % du trimestre précédent. Le private equity demeure néanmoins une classe d’actifs diversifiante et faiblement corrélée aux autres moteurs de marché, restant ainsi un levier pertinent pour la construction de portefeuilles résilients.
Fonds evergreen : un trimestre contrasté
Contrairement aux fonds traditionnels, les fonds perpétuels, ou evergreen, se distinguent par leur structure ouverte, permettant des souscriptions en continu. Cette flexibilité favorise un investissement régulier ainsi que le réinvestissement automatique des distributions, offrant aux investisseurs une exposition stable aux marchés privés tout en optimisant la gestion des liquidités et en simplifiant les flux de capitaux.
L’indice evergreen a été fortement pénalisé par la contre-performance de Novaxia One (–15,67 %), un fonds inclus dans ce sous-indice (qui comporte au total 12 fonds). Sa performance s’établit à –0,6 %, soit une sous-performance de 20 points de base par rapport au RPEI global. En excluant Novaxia One, la performance ressortirait à +1,2 % contre –0,1 % pour le RPEI.
Nous rappelons que la performance d’un fonds evergreen dépend étroitement de la qualité de la gestion et de la sélection d’opportunités, et que la construction d’un portefeuille diversifié de ces fonds requiert une due diligence approfondie.
Depuis son lancement, le sous-indice evergreen affiche une surperformance régulière, avec un hit rate de 65 % (proportion de trimestres affichant une surperformance).

Analyse par segment: des performances dispersées sur le trimestre
Sur ce trimestre, la performance du private equity présente une forte dispersion selon les segments. Deux d’entre eux tirent clairement leur épingle du jeu, principalement grâce à leur concentration sur l’Europe et leur faible exposition au dollar :
• Dette privée : le segment continue de se distinguer avec une performance solide de +1,2 % sur le trimestre. Cela illustre bien la capacité de cette classe d’actifs à générer des rendements réguliers et résilients, avec un effet de courbe en J limité. Depuis le lancement de l’indice, la performance annualisée atteint 6,7 %.
• Capital-transmission (Buyout) : ce segment affiche également une bonne performance de +1,1 % sur le trimestre, portée par des fonds feeder concentrés sur l’Europe. Parmi eux, Private Corner Wealth Expansion — investissant dans le fonds maître Ardian Expansion Fund VI spécialisé dans le mid-market européen — enregistre une progression de +10 %, tandis que Ciclad 7 Private Investors, exposé aux PME françaises via le fonds maître Ciclad 7, affiche +3 %. Depuis le lancement, la performance annualisée s’élève à 3,8 %.
Trois autres segments enregistrent en revanche des pertes au cours du trimestre :
• Secondaires : en repli de –1 % sur le trimestre, principalement en raison de la forte exposition au risque de change de certains composants majeurs. Par exemple, le fonds Opale Stratégies Secondaires, exposé à 70 % aux États-Unis, affiche une performance de –8,3 %. Malgré cet ajustement lié aux fluctuations de change, le segment des secondaires reste structurellement dynamique, avec une croissance annuelle moyenne du volume de transactions de 13 % sur la période 2014–2024, atteignant même un record au S1 2025 avec 102 Md USD de transactions. Pour les investisseurs particuliers en France, la performance annualisée du sous-indice reste élevée à 6,6 % depuis le lancement.
• Capital-développement (Growth Equity) : ce segment poursuit la tendance baissière amorcée en 2024, avec une performance de –0,6 % sur le trimestre. Sur la durée, la performance annualisée demeure positive à 2,7 %, mais en décélération.
• Immobilier : le segment enregistre une baisse de 2,8 %, principalement en raison de la contre-performance du fonds Novaxia One, impacté par les refus de permis de construire mentionnés précédemment.

Dette privée : un secteur solide malgré les turbulences médiatiques
Les récents cas de fraude impliquant Cantor Group V, First Brands, Tricolor ou Broadband Telecom ont bénéficié d’une forte exposition médiatique et suscité des inquiétudes quant à un éventuel risque systémique dans la dette privée. En réalité, ces situations demeurent circonscrites à certains segments spécifiques, principalement le crédit structuré (structured credit, CLOs) et le crédit adossé à des actifs (asset-based lending, ABF), et ne concernent pas directement les fonds de dette privée composant l’indice RPEI.
Le coeur des fonds dette privée du RPEI reste le crédit direct (direct lending), fondé sur une relation directe entre prêteur et emprunteur. Les prêts ne sont ni syndiqués ni revendus, ce qui permet un contrôle renforcé : documentation juridique stricte, covenants protecteurs, reporting régulier et suivi actif du collatéral. À l’inverse, les structures syndiquées, fragmentées entre de multiples investisseurs, offrent moins de visibilité et exposent davantage au risque de fraude ou de mauvaise information.
Les rendements du crédit privé restent attractifs malgré un léger resserrement des spreads :
• La baisse des taux de base (€STER, SOFR), consécutive à l’assouplissement des politiques monétaires, réduit mécaniquement le coût de financement.
• Les spreads se sont comprimés sous l’effet d’une concurrence accrue entre prêteurs, mais demeurent supérieurs à ceux des marchés publics : environ +520 points de base dans le privé contre +390 points de base sur le marché syndiqué.
Quelques signes de tension apparaissent néanmoins : près de 15 % des emprunteurs présentent un ratio EBITDA / intérêts inférieur à 1, traduisant une capacité de couverture limitée. Pour préserver leur trésorerie, un nombre croissant d’entreprises recourent aux intérêts PIK (Payment-In-Kind), ajoutant les intérêts dus au capital du prêt. Cette pratique, marginale il y a trois ans (6,9 % des prêts privés), concerne désormais près de 20 % du marché, dont 10,8 % sur des prêts ayant ajouté cette clause a posteriori.
Les PIK traduisent une fragilité accrue de certains emprunteurs, mais illustrent aussi la souplesse structurelle du private credit, capable d’aménager ses conditions pour préserver la continuité financière des entreprises financées.
Portefeuilles Ramify
Performances hypothétiques des portefeuilles Ramify :
|
Portefeuille |
Perf T3 2024 |
Perf T4 2024 |
Perf T1 2025 |
Perf T2 2025 |
|
Défensif |
2.14% |
1.99% |
1.73% |
1.50% |
|
Equilibré |
1.23% |
2.21% |
1.05% |
0.40% |
|
Dynamique |
0.56% |
1.58% |
0.55% |
0.99% |
Note: Pour les fonds à reporting semestriel, dans les trimestres sans reporting (principalement T1 et T3), nous considérons que la performance a été nulle.
Performances des fonds sous-jacents :
|
Libellé |
Perf Q3 2024 |
Perf Q4 2024 |
Perf Q1 2025 |
Perf Q2 2025 |
|
Private Corner Buyout EQT Strategy |
0.00% |
0.00% |
0.00% |
0.00% |
|
MCF ACCESS FEEDER |
0.00% |
0.00% |
0.00% |
0.19% |
|
FPS Pams PE Carlyle Access Fund 2024 |
0.00% |
0.00% |
0.00% |
-8.05% |
|
Peqan Co-investissement 2022 |
0.00% |
0.24% |
0.00% |
-1.29% |
|
FAPEP III |
0.00% |
3.71% |
0.00% |
-4.39% |
|
Eurazeo Secondary Feeder Fund V |
0.00% |
0.00% |
0.00% |
10.00% |
|
Partners Group Secondary VIII Strategy |
0.00% |
0.00% |
0.00% |
0.00% |
|
BHF Secondaries Fund II |
0.00% |
6.70% |
0.73% |
1.15% |
|
Eurazeo Private Value Europe 3 |
1.67% |
1.24% |
1.26% |
0.75% |
|
Eiffel Infrastructures Vertes |
2.91% |
1.86% |
1.62% |
1.23% |
|
Tikehau European Private Credit |
0.00% |
0.00% |
0.00% |
2.37% |
|
ECRED |
2.24% |
2.39% |
1.98% |
1.92% |
|
SWEN Exclusive Infrastructures 2 |
0.00% |
0.00% |
0.00% |
-0.90% |
Commentaires :
• Fonds sans performance publiée par les maisons de gestion T2 2025 (généralement des fonds récents, aux souscriptions toujours ouvertes) :
o Private Corner Buyout EQT Strategy
o Partners Group Secondary VIII Strategy
• Fonds à reporting semestriel :
o Peqan Co-investissement 2022
o FAPEP III


