22112024

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Actualité des sociétés

Miser sur le développement durable européen

EDRAM Marc Halperin

Interview de Marc Halperin, gérant du fonds Edmond de Rothschild SICAV Euro Sustainable Equity chez Edmond de Rothschild Asset Management.

 

 

Quel est l’objectif de gestion du fonds Edmond de Rothschild SICAV Euro Sustainable Equity ?
Il s’agit d’un fonds investi en actions de toutes capitalisations de la zone euro. Eligible au PEA et labellisé ISR depuis 2009, il est investi dans des valeurs qui offrent des perspectives prometteuses tout en apportant des réponses aux enjeux désormais cruciaux du développement durable.

Comment est structurée l’équipe de gestion ?
Les aspects financiers et extra-financiers étant fortement imbriqués dans notre processus de gestion, deux membres de l’équipe dédiée à l’ISR travaillent au quotidien à mes côtés : Jean-Philippe Desmartin, notre directeur de l’investissement responsable, et Clémence Moullot, qui analyse le profil ISR des valeurs de notre univers d’investissement. Nous nous appuyons par ailleurs sur de nombreuses interactions avec l’ensemble des expertises disponibles au sein de la société de gestion, que ce soit sur l’univers d’investissement actions européennes ou sur toutes les autres classes d’actifs pour lesquelles nous avons, pour chacune, un référent ISR. Ces interactions s’opèrent via un outil informatique spécifique et des réunions hebdomadaires.

Sur quels aspects repose votre méthodologie ISR propriétaire ?
Le fonds, classé article 8 SFDR, a obtenu les labels ISR français, belge et prochainement allemand. Ces trois labels, complémentaires quant à leurs exigences, témoignent de la rigueur et de la richesse de notre approche tant sur le front de la notation ESG, des considérations environnementales, des exclusions, de l’engagement actionnarial que de l’impact. Dans cette démarche, nous prenons en compte les perspectives d’amélioration du positionnement extra-financier de chaque entreprise dans la mesure où un re-rating extra-financier implique à terme une revalorisation du titre.

Comment déployez-vous cette approche ?
En nous appuyant sur la recherche ISR interne, nous privilégions une approche best in universe qui est l’approche commune retenue par les équipes de gestion d’Edmond de Rothschild AM. Celle-ci présente l’avantage de privilégier les acteurs qui amènent des solutions aux enjeux du développement durable et d’éviter les entreprises qui ne répondent pas à ces nouvelles exigences. Concernant la notation, nous utilisons une échelle similaire à celle utilisée par les agences de rating de crédit : nous attribuons des notes comprises entre AAA, la meilleure, et CCC, la moins bonne. Pour le portefeuille, nous ne retenons que les entreprises les plus vertueuses, c’est-à-dire celles ayant une note égale ou supérieure à A, ce qui nous amène à un taux de sélectivité élevé, voisin de 40 %, soit le double de l’exigence du label ISR français.

Sur quoi s’opère cette sélectivité ?
Nous évitons principalement les activités qui ne répondent pas aux objectifs de développement durable, notamment en termes d’empreinte carbone. Pour autant, nous ne sommes pas totalement absents des secteurs en question. Par exemple, nous n’investissons pas dans les compagnies aériennes et les constructeurs aéronautiques mais nous sommes présents sur ces secteurs via Amadeus, un groupe opérant dans les réservations et la vente de billets d’avion. Même chose dans le secteur de l’énergie où nous sommes tout aussi sélectifs : nous avons retenu NESTE, le spécialiste mondial du diesel renouvelable ou biodiesel. Cela nous permet d’être exposés au secteur sans être exposés aux risques extra-financiers.

Vous appuyez-vous uniquement sur votre recherche ISR interne ?
Non, nous avons également accès aux travaux des agences de notation ISR externes qui nous apportent les analyses et ressources nécessaires sur les entreprises cotées hors d’Europe et sur les marchés pour lesquels nous n’avons pas déployé d’équipes spécifiques en interne. Elles nous permettent aussi – c’est le cas du cabinet de conseil Carbone 4 – de valider, le cas échéant, les mesures d’impact de notre portefeuille.

Concernant l’impact des entreprises de votre portefeuille, quels sont les principaux aspects que vous avez retenus ?
Il y a bien sûr l’impact sur l’environnement et l’empreinte carbone de l’activité. Notre fonds est l’un des rares fonds généralistes qui répondent d’ores et déjà aux objectifs des Accords de Paris avec une trajectoire inférieure à 2°C. Nous sommes également attentifs aux taux d’accidents du travail et à l’absentéisme, au pourcentage d’administrateurs indépendants et à celui de femmes au sein du comité exécutif. Enfin, le fait que l’entreprise soit signataire du Pacte mondial des Nations Unies est également important. Cette vigilance, combinée à un suivi systématique des controverses qui peuvent toucher l’entreprise, nous permet d’avoir une meilleure maîtrise des risques avec notamment une volatilité du fonds inférieure de 300 bips à celle de notre benchmark.

Et concernant les objectifs de développement durables (ODD) de l’ONU, comment s’inscrivent-ils dans votre démarche ?
Nous apportons une attention particulière aux ODD. Généralement, les valeurs cotées ne permettent d’en adresser que 7 ou 8 sur les 17 identifiées par l’ONU. Les 45 entreprises de notre portefeuille activent en moyenne près de 5 ODD par titre contre 2 en moyenne par valeur pour notre indice de référence. Parmi les valeurs du portefeuille, Amadeus permet, via la formation de son personnel, d’activer l’ODD 4 qui vise à fournir une éducation de qualité. Le groupe L’Oréal, quant à lui, permet d’activer en particulier l’ODD 5 sur l’égalité de traitement entre les hommes et les femmes.

Quel est le profil des valeurs que vous privilégiez ?
Comme indiqué plus haut, nous investissons sur les sociétés qui ont un potentiel de croissance significatif et durable. Parmi celles-ci, nous distinguons deux catégories de valeurs : les sociétés innovantes et les acteurs historiques qui se réinventent. Les premières, qui représentent aujourd’hui 43 % des actifs gérés, proposent de nouveaux produits ou services qui répondent aux nouveaux besoins des consommateurs et des industriels. Les seconds, pour 57 % du portefeuille, sont des groupes qui, après un recentrage de leur activité et de nouveaux investissements, ont su rebondir et gagnent aujourd’hui des parts de marché. C’est par exemple le cas du groupe Smurfit Kappa, spécialiste de l’emballage carton qui a su s’adapter aux évolutions des exigences environnementales.

Thierry Bisaga