Gestion d’actifs
Une approche de gestion singulière
- Vendredi 12 juillet 2024 - 11:15
- | Par Thierry Bisaga
Interview de Edouard Faure, Responsable Gestion Crédit, du fonds Swiss Life Funds (F) Opportunité High Yield 2028, chez Swiss Life Asset Managers France
Comment est structurée l’équipe de gestion en charge du fonds ?
Notre équipe crédit compte huit personnes, dont cinq sont consacrées au segment high yield. Elle a été récemment complétée par deux nouvelles arrivées ayant un profil sénior. Tous les membres de l’équipe sont gérants-analystes et ont, en moyenne, plus de 15 ans d’expérience sur les marchés. Pour optimiser nos décisions d’investissement, nous nous répartissons les dossiers en fonction des secteurs étudiés, ce qui permet une connaissance approfondie de chaque secteur mais ce qui n’empêche naturellement pas les échanges de points de vue afin de toujours avoir un regard critique sur les dossiers.
Vous développez une expertise sur les fonds à échéance depuis 12 ans. Quels sont vos atouts dans ce domaine ?
Nous avons désormais à notre actif une expertise historique avec un bon track record, nos fonds étant classés parmi les premiers de leurs catégories respectives1. Combiné à ces bonnes performances2, le dynamisme de nos équipes commerciales – qui ont rapidement référencé nos fonds sur les différentes plateformes – explique la forte croissance de nos encours depuis trois ans. On peut ajouter à cela que nous avions d’ores et déjà construit une gamme de fonds. Par ailleurs, nous sommes en mesure d’assurer la liquidité au quotidien sans période de commercialisation, et nous proposons aux investisseurs la possibilité d’entrer sur le fonds et d’en sortir à tout moment3.
Comment s’articule votre processus de gestion ?
Nous avons déployé une approche bottom-up pour intervenir à la fois sur les marchés primaires et sur les marchés secondaires. Dans SLF (F) Opportunité High Yield 2028, comme dans tous nos fonds à échéance, l’allocation sectorielle ou géographique est la résultante de nos analyses. Cela dit, la diversification est importante. Nous sommes très attentifs à la structure du portefeuille et à son équilibre. Les pondérations par émetteur les plus importantes représentent autour de 2 % de l’actif géré. Par ailleurs, il s’agit de fonds pur high yield, à l’exception d’un ou deux titres sur 120 au sein du portefeuille.
Quel est l’étendue de votre univers d’investissement ?
Nous sommes investis sur les segments high yield euro, dollar et sterling. Le marché américain est un marché particulièrement important. Mature, il offre un potentiel de diversification important tant en termes d’émetteurs que de secteurs. On y trouve des titres liquides et des souches de tailles importantes. Nous couvrons systématiquement toutes nos positions en devises pour éviter tout risque de change. Ainsi, nous pouvons nous concentrer sur le risque majeur qui est le risque de défaut des entreprises.
A ce sujet, votre politique de gestion des risques vous amène à exclure certains titres. Pour quelles
raisons ?
Dès 2012, nous avons décidé d’exclure le secteur des banques et des assurances. Les titres subordonnés bancaires ont certaines particularités – comme le fait de suspendre ou annuler le versement de coupons, voire de suspendre les remboursements – qui ne sont pas compatibles avec les spécificités des fonds à échéance. Nous excluons également les titres des marchés émergents pour réduire les risquesgéopolitiques. Nous considérons en effet que les risques associés à un titre émergent relèvent à la fois del’entreprises qui l’émet mais aussi du pays dans lequel il est émis. Enfin, nous ne disposons que de trèspeu de données historiques sur les marchés émergents dont les lois des faillites ne sont par ailleurs pastoujours bien définies.
Vous excluez également le secteur de l’énergie ?
Oui, nous avons fait ce choix depuis 2020 car le secteur de l’énergie fait souvent l’objet de vagues de défaut. Cela s’explique par la forte cyclicité du prix du pétrole auquel les valeurs du secteur sont fortement corrélées. Ce fut le cas en 2015 mais aussi en 2020 lorsque les prix de l’or noir se sont effondrés. Historiquement, on observe de tels mouvements tous les quatre ou cinq ans, ce qui est inférieur à l’horizon d’investissement généralement retenu pour les fonds à échéance. Il s’agit donc d’un secteur qui exige une gestion tactique, ce qui n’est pas compatible avec le portage de rigueur sur cinq ou six ans dans les fonds à échéance.
Vous évoquez aussi le risque de remboursement anticipé des titres du marché high yield. De quoi s’agit-il ?
Contrairement à ce que l’on observe sur les marchés de titres investment grade, les marchés high yield ont cette spécificité que la grande majorité des titres émis (95 %) ont une structure de call à la main de l’émetteur qui prévoit un remboursement possible chaque année à partir de la 2e ou 3e année. Cela constitue un risque dans la gestion d’un fonds à échéance car même si nous touchons une légère prime en cas de remboursement anticipé, elle ne nous compense pas des coupons que l’on aurait touché si le titre n’avait pas été rappelé, et il nous faut réinvestir les montants remboursés sans altérer le rendement du fonds. Or le gisement des titres avec une maturité courte est donc souvent réduit et offre peu d’opportunités. Un autre aspect négatif de la capacité des émetteurs à rappeler leurs titres de manière anticipé est qu’on ne peut pas savoir quand ce rappel aura lieu. Nous ne connaissons donc la maturité réelle d’un titre High Yield. Cela dépend de l’évolution du marché et de la qualité de crédit de chaque émetteur.
Comment y remédiez-vous ?
Ne pouvant nous appuyer ni sur la date de maturité finale, ni sur celle du 1er call, nous avons fait le choix de définir, pour les titres en portefeuille, une date de maturité statistique – ou effective – qui correspond à la date moyenne observée pour le rappel des titres et évolue en fonction du prix de l’obligation et des conditions de marché. Ensuite, on s’assure que la moyenne des maturités effectives des titres en portefeuille est bien centrée sur l’échéance du fonds ce qui nous permet d’optimiser les rendements attendus. Enfin, environ un an avant l’échéance du fonds, nous veillons à resserrer la dispersion des maturités des titres que nous détenons en portefeuille afin de limiter le risque de vente forcée à l’échéance. C’est ainsi que la correction du dernier trimestre 2018 et la crise du Covid en 2020 ont eu un impact limité sur la performance in fine de nos portefeuilles. Ces efforts pour la bonne gestion des risques nous permettent de proposer des fonds lisibles et compréhensibles par les investisseurs.
TB