23112024

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Le quotidien d'un cabinet de CGP : Corinne Sauze et Pascal Jouve témoignent

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Le confinement, la crise sanitaire et tous ses impacts... Corinne Sauze et Pascal Jouve, deux CGP de Toulon, racontent comment ils sont assaillis de questions de leurs clients indépendants davantage préoccupés par les sujets de protection sociale que de placements. 

 

Plus de 1 200 mails. Pas en un mois : en une semaine ! Corinne Sauze et Pascal Jouve, conseillers en gestion de patrimoine, associés au sein du cabinet Corellon à Toulon, sont submergés par les questions de clients et d’autres aussi qui ne savent pas à quelle porte frapper. Pas tellement pour leurs placements, non. Ce sont surtout des professionnels libéraux, des artisans, des commerçants, des patrons de petites entreprises qui se demandent de quoi ils vont vivre s’ils sont interdits de travailler. « C’est là qu’on voit à quoi sert un conseil spécialisé en protection sociale », souligne Pascal Jouve. 

« C’est la première fois que nous vivons une telle crise, les gens sont perdus »

« Notre rôle, nous explique-t-il, c’est avant tout la protection des flux, c’est-à-dire comment s’assurer des revenus au quotidien pour soi et ses proches, notamment en cas d'arrêt de travail ». Nombreux sont ceux qui se sont lancés à crédit dans des opérations immobilières. Ce qui suscite plein de questions. En vrac : l’assurance peut-elle rembourser la banque ? Que faire si mon locataire ne règle plus ses loyers avec une prolongation de la trêve hivernale de deux mois ? Comment puis-je demander à la banque de reporter mes mensualités ?

« C’est la première fois, observe Corinne Sauze, que nous vivons une telle crise, les gens sont perdus ». Elle cite le cas par exemple de cette infirmière libérale, contaminée et confinée, pour laquelle ils vont, avec beaucoup de difficultés tant les compagnies d’assurances croulent sous les demandes, se battre pour que son contrat de protection sociale lui alloue rapidement un revenu de remplacement. « On ne tape pas sur des casseroles à la fenêtre le soir à 20 heures, on la soutient en faisant notre job », sourit-elle.

Les 2/3 des assureurs souvent injoignables 

L’ère de la digitalisation est encore loin d’avoir résolu la question de la paperasserie, sans compter les heures perdues parce que telle compagnie d’assurance demande des documents que le secret médical interdit de communiquer ! « C’est épuisant parce que certains cas sont extrêmement durs humainement, parce que le standard téléphonique saturé d’appels a sauté cinq fois cette semaine, parce que les deux tiers des 22 compagnies d’assurances avec lesquelles nous travaillons sont souvent injoignables, parce que, même avec une ligne en fibre pro, les liaisons sont très lentes et leurs serveurs plantent », commente Pascal Jouve.

Une bataille rude qui se joue « sept jours sur sept, avec en ce moment des journées parfois de 14 heures au boulot », lâche cet expert que nous avons joint un samedi en fin de journée. « Et demain, j’ai encore 79 appels à passer en réponse aux mails ». C’est bien simple, il a tapissé son bureau au sol de tous les dossiers à traiter. Environ 12 m2 de dossiers à régler. A cela s'ajoutent les retardataires, ceux qui ne voyaient pas l'intérêt d'être assurés et qui se précipitent maintenant pour avoir un contrat.

« Est-ce qu’il faut faire quelque chose ? », s'inquiète une cliente

Côté placements, « nous sommes aussi sur le front, les marchés financiers ont baissé, il y a de l’inquiétude mais au fond les clients savent que le temps viendra où ils remonteront, des crises ils en ont connu plus d’une », constate Pascal Jouve, citant cette cliente qui, d’une voix hésitante, lui demande : « est-ce qu’il faut faire quelque chose ? »

C’est là aussi que le conseiller en gestion de patrimoine, CGP dit-on plus souvent, peut être un expert précieux, car « les gens sont dans la sur-réactivité, dans un mode qui fonctionne dans l’immédiateté. Nous sommes, nous, dans une échelle de temps plus longue, surtout en matière de placements. Même dans la période actuelle, nous prenons tout de même du recul. C'est notre déformation professionnelle, mais c’est aussi ce qui donne du sens et de la valeur à notre métier », conclut-il.

Jean-Denis Errard