Fiscalité
Les notaires se retrouvent en famille
- Mercredi 10 septembre 2025 - 16:20
- | Par Jonathan Blondelet
Union, séparation, succession, filiation… Pour leur 121e Congrès, les notaires ont organisé 15 propositions autour de leur thématique de prédilection, la famille. Certaines ne manqueront pas de faire parler, comme la suppression de la réserve du conjoint survivant ou la possibilité d’écarter un indivisaire lors d’un partage judiciaire.
Chaque année, une poignée d’officiers ministériels travaille d’arrache-pied sur une thématique afin d’en extraire une série de propositions destinées à modifier notre ordonnancement juridique. Le 121e Congrès des notaires, qui se tiendra du 24 au 26 septembre, marque un retour aux sources avec son thème « famille et créativité notariale, accompagner les tribus d’aujourd’hui ».
« Nous utilisons le mot tribu car il y a eu ces 25 dernières années un changement radical dans la façon dont la famille se vit », justifie Jean Gasté, président de ce 121e Congrès, qui présentait ses propositions le 9 septembre.
Une proposition transversale postule justement pour prendre acte de la modernisation des modèles familiaux en créant une déclaration de beau-parentalité. Volontaire, facultative et (bien évidemment) notariée, la déclaration prendrait la forme soit d’un acte unilatéral produisant des effets limités si l’enfant est mineur, soit d’un acte de déclaration réciproque avec des effets plus étendus si l’enfant est majeur.
Pour le reste, 14 propositions gravitent autour des différentes étapes de la vie de famille, de l’union jusqu’à la mort.
Naissance de la famille
- Réaménager le régime de l’indivision dans le Pacs, ou « réanimer un régime abandonné par la pratique notariale », introduit Stéphane David, rapporteur général. Les notaires prêchent pour leur paroisse en proposant que cette option, aujourd’hui réalisable sous seing privée, nécessite forcément un acte notarié. Le régime serait rendu plus modulaire en excluant certains biens de l’indivision
- Pouvoir pour les époux exclure certains biens de la communauté réduite aux acquêts, notamment les biens professionnels ou les fruits et revenus de leurs biens propres
- En cas de mariage en séparation de biens, présumer que « toutes les dépenses ayant une affectation familiale et qui sont financées par l’un des époux à l’aide de ses gains et salaires, économisés ou non, sont présumés participer de son obligation de contribuer aux charges du mariage »
- Autoriser les parents à désigner un tuteur de façon anticipé en cas d’empêchement d’exercer l’autorité parentale, comme cela est déjà le cas pour le décès
Vie de la famille
- Supprimer le droit d’opposition des enfants et des tiers en cas de changement de régime matrimonial. « Les enfants peuvent déjà effectuer une action en retranchement et les créanciers une action paulienne », justifie Stéphane David
- Créer un corpus de règles dans le Code civil destiné à fixer les prérogatives de l’usufruitier et du nu-propriétaire sur les droits sociaux. Les notaires veulent que l’usufruitier puisse appréhender les sommes placées en report à nouveau, de même que celles affectées en réserve (sous la forme d’un quasi-usufruit légal sauf convention contraire)
- Revoir le régime de la participation aux acquêts (qui doit être choisi devant notaire). L’action en liquidation de la créance de participation se prescrirait par cinq ans après dissolution du mariage, et les règles de valorisation des biens pour le calcul de celle-ci seraient revues
- Permettre au prêteur de deniers de prendre une hypothèque légale lors du financement d’une opération de partage comme de vente afin de faciliter les opérations financières familiales. Il s’agit ici d’éviter le coût de la publicité foncière d’une hypothèque conventionnelle en la remplaçant par une « superhypothèque »
- Faciliter la sortie judiciaire de l’indivision en remplaçant l’indivisaire réfractaire par une personne qualifiée qui le représente au tribunal et en renforçant l’obligation de communication des indivisaires vis-à-vis du notaire commis pour l’opération de liquidation et partage
Décès au sein de la famille
- Abroger la réserve héréditaire du conjoint survivant. « Les liens entre conjoint et défunt sont des liens d’amour, alors que ceux avec les enfants sont des liens de sang, assume Stéphane David. Il est surprenant d’imposer un droit au bénéfice d’un héritier qui n’est lié que par la volonté : laissons faire la volonté ! »
- Supprimer les droits de retour légaux, qui permettent à la famille du défunt de reprendre les biens donnés en l’absence de descendant. Celui des parents serait remplacé par une créance alimentaire, celui des frères et sœurs purement abrogé
- Créer un pacte de famille de gel des valeurs destiné à faciliter les transmissions anticipées. Il serait valable tant pour le rapport successoral que pour le calcul de la réserve et les imputations
- Sécuriser la technique de la dévolution de gérance, qui consiste à désigner par avance le successeur d’un gérant à son décès, généralement dans les statuts initiaux. Alors qu’elle est déjà consacrée par la pratique, les notaires proposent de lui donner une assise légale
- Permettre aux héritiers d’un associé d’une société civile qui sont en attente d’agrément pour la transmission des parts de bénéficier des dividendes distribués entre la date d’ouverture de la succession et la date à laquelle les associés survivants statuent sur la demande d’agrément