L'Edito du mois - Septembre 2018

 

L'Edito de Jean-Denis Errard

Rédacteur en chef de Gestion de Fortune
Cette adresse e-mail est protégée contre les robots spammeurs. Vous devez activer le JavaScript pour la visualiser.

Mérovingien

«La recherche de performance comporte un risque de perte en capital », indique une publicité pour un produit financier. Je me demande si l’AMF ne devrait pas imposer comme mise en garde de la même manière : « la recherche de sécurité comporte un risque de perte en capital ». Car enfin, il n’existe plus aucune option rentable permettant de faire fructifier un capital sans prendre de risque ! Il fut un temps où l’épargnant paresseux pouvait s’enrichir sans rien faire avec les sicav monétaires et l’assurance vie en euros. Cette époque est révolue. Ce message d’alerte sur le risque de perte avec des fonds boursiers me paraît désuet. Il vaudrait mieux expliquer, ce que la plupart des épargnants ignorent, qu’en pouvoir d’achat, le « sans risque » (0,75 % pour le livret d’épargne à 2 % au mieux cette année pour l’assurance vie en euros) garantit de perdre de l’argent. Le « panier de la ménagère » de 100 € en janvier 2018 coûtera sans doute 102 € en janvier 2019 (selon les prévisions d’inflation) alors que son livret n’aura une valeur que 100,75 €. Ne vaudrait-il pas mieux dire : « Pour protéger le pouvoir d’achat de votre épargne, il faut savoir prendre des risques » ? En somme, les placements c’est comme dans la vie : en créant son entreprise on a plus de chances de vivre mieux qu’en entrant dans la fonction publique. Mais le statut, c’est la sécurité. Ceci dit, dans le palmarès de Challenges des 500 grandes fortunes, on ne trouve aucun haut fonctionnaire.

C’est une aubaine pour le conseil en gestion de patrimoine d’avoir à expliquer ce changement d’époque. Il ne s’agit pas d’opposer le fonds en euros et une unité de compte. Mais – et c’est là que le rôle du conseiller est essentiel – il s’agit de faire comprendre l’intérêt de la diversification en intégrant une nouvelle donnée qui est celle du temps, ou de la liquidité. Autrefois, l’épargnant vivait avec l’obsession à la fois de la sécurité et de la disponibilité à tout moment. Cette exigence a aujourd’hui un coût pour l’épargnant. Le message le plus approprié pour l’information de l’épargnant devrait être : « La recherche de performance exige une vision de long terme ». Hervé Thiard, DG de Pictet AM France-Benelux, constate, lui, que les mentalités progressent. Tant mieux !

Fini le temps des Mérovingiens, désignés comme les rois fainéants (ainsi dénommés pour avoir « fait néant »). Face à ce monde actuel en pleine mutation en termes de concurrence et de migrations, il semble opportun d’entrer dans l’ère des bâtisseurs, celle de l’apport aux fonds propres des entreprises (private equity) et celle de la finance solidaire (socialement responsable). Les nouvelles normes européennes devraient de ce point de vue servir de balisage vers ce changement de paradigme. Mettre l’argent au travail, une mission de premier ordre pour les conseils en gestion de patrimoine !