L'Edito du mois - Juillet/Août 2018

 

L'Edito de Jean-Denis Errard

Rédacteur en chef de Gestion de Fortune
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Haro sur le baudet

Le matraquage fiscal de l’immobilier est stupéfiant. Tout a commencé avec la loi de finances avec les deux « flingues » fiscaux que sont la flax tax de 30 % et l’IFI. Une flat tax qui, sous prétexte que les capitaux s’envolent et que les immeubles restent, revient à taxer les revenus fonciers deux fois plus que les divi- dendes financiers (45 % de taux marginal maximal + 17,2 % de prélèvements sociaux). Quant à l’impôt sur la fortune, l’immobilier sert de prétexte politique pour afficher une « réforme » et non une suppression et pour culpabiliser ceux qui ne « roulent » pas pour l’investissement dit « productif » et la création d’emplois.

Le législateur a poussé la mesquinerie jusqu’à n’autoriser la déduction de l’emprunt souscrit pour l’achat de la résidence principale qu’à hauteur de 70% de sa valeur, ce qui est légalement contestable. D’ailleurs, n’allez pas croire que l’IFI ne serait qu’un ISF immobilier. Quel casse-tête ce Bofip ! L’administration a été incapable de publier ses commentaires avant la date initialement prévue pour les déclarations.

S’en sont suivies des polémiques sur la fiscalité locale. Bercy a annoncé une suppression de la taxe d’habitation. Bonne nouvelle, direz-vous, mais l’histoire fiscale de notre pays nous a appris à nous méfier des jeux de bonneteau de Bercy : la taxe n’est plus là, elle réapparaît là, les communes pouvant librement augmenter les taxes foncières pour compenser... Et puis on apprend que cela ne concernera que l’habitation principale. La révision des valeurs cadastrales réservera sans doute aussi des surprises.

Maintenant Matignon nous apprend que les droits de mutation vont pouvoir augmenter. Avec ce marché immobilier en pleine euphorie dans les grandes métropoles, dopé par des taux de crédits très bas, le procédé est malin...

Ah, n’oublions pas aussi ce rapport de la Cour des comptes qui tire à boulets rouges sur la défiscalisation immobilière et aussi le décret sur le plafonnement des commissions Pinel !
La pierre serait un produit de rente. Pour qui ? L’immobilier, plus que jamais, est une vraie vache à lait pour notre Etat impécunieux, incapable de ralentir ses dépenses comme vient de le rappeler pour la énième fois la Cour de comptes.

Le plus choquant, c’est cette discrimination patrimoniale, ce sectarisme arbitraire contre l’immobilier, ce qui devrait quand même un minimum interpeler le Conseil constitutionnel comme une atteinte à la liberté, au droit de propriété, à l’universalité du patrimoine ! Que dire de l’incohérence du législateur ! Comment comprendre ainsi, en matière d’immobilier d’entreprises, que des parts de SCPI soient punissables fiscalement alors que des parts d’OPCI seront mieux traitées (flat tax et exonération partielle d’IFI) et que des foncières cotées auront droit à un régime de faveur tout comme les FCPR qui financent les activités de promotion immobilière. Sans oublier que l’immobilier des fonds en euros est exonéré contrairement aux unités de compte.

L’impécuniosité de notre Etat aboutit vraiment à des contorsions fiscales délirantes.