Colère
Dans le récent rapport intitulé « Les grands défis économiques » présenté par une commission internationale présidée par les économistes Olivier Blanchard et Jean Tirole, il est question de l’assurance vie. Une fois encore, cette solution d’épargne est montrée du doigt par des experts comme une cause d’inéquité fiscale et d’inefficacité financière au détriment, nous dit-on, de l’investissement au capital des entreprises. On peut lire dans ce document qui a été remis au Chef de l’Etat : « Nous ne voyons pas comment le fait d’encourager des ménages bien informés à pratiquer l’optimisation fiscale peut rendre le système plus juste. Un exemple en est donné avec le traitement réservé aux polices d’assurance vie ». Une « optimisation fiscale » et l’apanage des « ménages bien informés », voilà comment ces experts voient l’assurance vie ! Curieux, non ? Cette solution d’épargne n’est-elle largement plébiscitée par les épargnants français de tout niveau de revenus et de patrimoine !
Quant à affirmer que l’assurance vie fausserait la justice fiscale au regard des droits de succession, j’y vois une pétition de principe. Ce rapport n’apporte aucune preuve. Le dispositif actuel n’a rien de scandaleux comme le laisse entendre ce rapport ! Faut-il rappeler à ces économistes -qui n’en disent mot- que les sommes versées après 70 ans, un âge proche du départ à la retraite, sont taxées au barème normal de droits de succession au-delà de 30 500 € ! Et avant ces 70 ans les versements ne sont défiscalisés que jusqu’à 152 500 € par bénéficiaire. Le rapport affirme qu’au-delà « le taux préféren- tiel -20 % et 31,25 % au-delà de 700 000 €- devient particulièrement attractif pour les héritages importants et lorsque ceux-ci ne sont pas en ligne directe ». Encore une affirmation gratuite puisqu’aucune donnée statistique ne permet de savoir si la plupart des capitaux attribués par l’assureur bénéficieraient à des personnes sans lien familial direct. On peut même supposer le contraire.
Il est également déploré par ces économistes réputés que « cette exonération et le raisonnement qui justifie que l’on favorise ce type d’actifs par rapport à d’autres, en particulier d’autres investissements à long terme, plus sûrs, devraient être réexaminés ». Vieux serpent de mer et là encore, une affirmation à l’emporte-pièce. Les assureurs sont là pour assurer ! Eh bien qu’ils assurent ! Ce rapport Blanchard-Tirole aurait été bien inspiré de suggérer qu’une réforme permette d’améliorer la diversification des fonds en euros de façon à y intégrer plus d’actifs risqués, potentiellement performants et... utiles à l’économie.
« Les estimations actuelles, conclut le rapport, suggèrent que les recettes seraient de 20 % plus élevées sans cette exonération ». Et la confiance des épargnants vous y pensez messieurs les économistes ? Je ne peux m’empê- cher de rappeler ce coup de gueule du Premier ministre Georges Pompidou en 1966 à la vue de la pile de décrets à signer apportés par son collaborateur, nommé Jacques Chirac : « Arrêtez d’emmerder les Français ! »
1. Nemo auditur propriam turpitudinem allegans
2. Mes commentaires dans le numéro 313 d’avril 2020. Un appel est en cours