En 2024, plus d’un tiers des professionnels contrôlés par la Direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes ont fait l’objet de sanctions. Démarchage abusif, contrats piégés, crédits dissimulés : la rénovation énergétique reste un terreau fertile pour les margoulins.
Devant le manque de fiabilité des diagnostics de performance énergétique (DPE) et les pratiques peu scrupuleuses de certains professionnels, maintes fois soulignées par des associations de consommateurs et des instituts d’analyse, l’administration monte sa vigilance d’un cran.
Contrôles musclés
La Direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes (DGCCRF) a intensifié ses contrôles en 2024 : 1 000 établissements sont concernés, soit 20 % de plus qu’en 2023. La moisson a été bonne, puisque 34 % des professionnels concernés présentent « des manquements graves, sanctionnés par des suites correctives et répressives ». Les infractions constatées ont donné lieu à 140 injonctions de mise en conformité, plus de 50 amendes administratives et 140 procès-verbaux pénaux (et donc passibles de suites judiciaires).
L’administration a notamment infligé une amende de 1,5 M€ à une entreprise d’Ile-de-France, et permis la condamnation d’un gérant d’une entreprise des Côtes-d’Armor à 5 ans de prison et 1,1 M€ de dommages et intérêts.
« L’essor de la rénovation énergétique, stimulé par la hausse du prix de l’énergie et les impératifs écologiques, attire aussi bien des entreprises sérieuses que des acteurs mal intentionnés », prévient la DGCCRF.
Contrôlés ciblés
Les entreprises concernées - entreprises de bâtiment, prestataires, démarcheurs, sous-traitants, établissements de crédit, Accompagnateurs Renov’… - interviennent à tous les stades de la rénovation. Les contrôles ne sont cependant pas représentatifs de l’honorabilité du secteur, puisque la DGCCRF a effectué son ciblage en contrôlant prioritairement les opérateurs évalués à risque ou ayant fait l’objet de signalements. Une source intarissable, en témoignent les 26 000 signalements en lien avec des fraudes à la rénovation énergétique déposés sur la plateforme Signal Conso.
Les griefs relevés sont nombreux : pratiques commerciales trompeuses, voire agressives, clauses abusives, démarchage téléphonique interdit, non-respect de la réglementation applicable à l’obligation générale d’information précontractuelle ou à la vente hors-établissement.
Contrôlés justifiés
Comme nombre de Français, la DGCCRF a pu constater l’ampleur du démarchage téléphonique illicite, « certains opérateurs frauduleux se présentant même comme mandatés par des organismes publics, collectivités ou associations pour obtenir la confiance des consommateurs ». Les argumentaires commerciaux vont du classique « autofinancement » en lien avec l’installation de panneaux photovoltaïques à la mention d’aides publiques inexistantes ou inapplicables.
Le tout en tentant d’obérer la réflexion du prospect par une pression à signer vite et sans respect du délai de rétractation. Plutôt logique quand les contrats proposés sont truffés de clauses abusives et font parfois souscrire des crédits à l’insu du consommateur, qui pense de son côté faire face à un document non engageant.
« Les factures ensuite délivrées aux consommateurs sont souvent incomplètes, rendant difficile l’exercice des recours en matière de garantie décennale », ajoute la DGCCRF.
Aides rabotées
En juin 2025, Valérie Létard, ministre du Logement, avait pris la décision de suspendre temporairement les aides à la rénovation globale, après que l’Agence nationale de l’habitat ait détecté, dans le cadre de la lutte contre la fraude à MaPrimRénov’, 44 000 dossiers frauduleux.
Le dispositif a depuis rouvert ses portes dans une version rabotée, finançant seulement les DPE classés E à G. 13 000 dossiers seront acceptés d’ici à la fin de l’année, alors qu’entre 30 et 60 000 seraient en attente.
« L’enveloppe 2025 ayant été brûlée en six mois, les dossiers reportés pèseront sur 2026. Pour tout financer, il faudrait tripler les crédits, ce qui paraît irréaliste dans le contexte budgétaire actuel », fait remarquer dans nos colonnes Sébastien Aujard, président du groupe Apolline Courtage & Patrimoine Financement (1).
(1) Pour aller plus loin, retrouvez dans votre magazine Gestion de fortune n°372 un dossier consacré à la rénovation énergétique