Gestion d’actifs

"L'euro ne survivra pas"

Le M&G Global Macro Bond Fund figure parmi les produits que le gérant britannique M&G souhaite mettre en avant à la rentrée en France. C'est dans son bureau londonien que Mike Riddell, son cogérant, nous a reçu.



Vous remettez sur le devant de la scène un fonds pourtant créé voici 13 ans. Pourquoi cela ?
Mike Riddell : C'est vrai que ce fonds est ancien mais il a entre-temps beaucoup changé. Au départ, il s'agissait d'un fonds de fonds investi uniquement en produits M&G. Et puis, nous avons choisi de le repositionner et d'en faire l'outil le plus flexible que nous puissions gérer.

Comment cela ?
MR : Eh bien, nous pouvons choisir d'être investis uniquement sur les marchés émergents ou au contraire d'en être totalement absents. Notre exposition aux titres de créance pourra en effet être gérée à l'aide de produits dérivés comme des futures sur les taux et des CDS. Cela nous permettra par exemple de nous prémunir d'une éventuelle remontée des taux d'intérêt.

Mais n'êtes-vous pas tout simplement en train de faire du hedge fund ?
MR : Cela y ressemble mais ce n'en est pas un. Notre gestion s'appuie sur trois moteurs de performance : les obligations, la monnaie et le crédit. Nos choix d'investissement résultent à la fois d'une analyse top-down de la situation et d'une confrontation des valorisations sur le marché.

Justement, quelle est votre analyse aujourd'hui ?
MR : Le monde est en décroissance et considère que l'inflation ne reviendra pas, du moins si l'on observe les valorisations sur les marchés obligataires. Nous pensons au contraire que l'inflation pourrait augmenter de 3 % à 5 % dans les dix prochaines années. De ce point de vue, l'achat d'obligations indexées sur l'inflation devrait se révéler très rémunérateur à l'avenir.

Et quel est votre point de vue sur l'euro ?
MR : Si vous me demandez mon avis personnel, je considère que l'euro ne survivra pas à la crise qu'il traverse. La seule issue pour le sauver serait une union fiscale et budgétaire. Or voyez où en sont les Européens.

Comment se traduit cette opinion sur l'euro dans vos investissements ?
MR : Actuellement, 60% du portefeuille est placé en dollars au travers d'obligations indexées sur l'inflation, d'emprunts high yield et de bons du Trésor.

Qu'en est-il des pays émergents ?
MR : Concernant cette région du monde, les gens ne jurent le plus souvent que par la croissance du PIB sans s'intéresser aux valorisations des obligations. Mais celles-ci sont désormais peu attractives et appartiennent à ce que l'on nomme communément une classe d'actifs risquée. J'en veux pour preuve ce qui se passe en Chine. Tous les observateurs ne cessent de louer le bas niveau d'endettement du pays. Ce faisant, ils oublient l'importance de la dette privée.

Mais la croissance chinoise devrait rester soutenue, non ?
MR : Cette idée est en effet très répandue parmi les investisseurs. Seulement, si la croissance chinoise au cours des dix prochaines années n'est plus que de 5 %, plusieurs problèmes vont se poser. Tout d'abord dans le pays où le parti communiste maintient jusqu'à présent son pouvoir grâce à la croissance économique. A l'étranger ensuite. Si la croissance chinoise ralentit, un grand nombre de pays et non des moindres vont être touchés, je pense au Brésil, à la Corée et à l'Australie. En ce moment, nous shortons via les CDS le Brésil, la Pologne, la Russie et la Turquie.

Mis à part le dollar, quelles autres monnaies privilégiez-vous ?
MR : Nous investissons aussi dans les monnaies des pays nordiques comme les couronnes danoise, suédoise et norvégienne. Si l'on regarde le marché des CDS aujourd'hui, la Norvège est le pays pour lequel il est impossible d'imaginer un quelconque défaut. Mieux encore, depuis quelques semaines, sa monnaie n'est plus perçue comme liée aux matières premières.

 

Propos recueillis par Gilles Petit

 

Mis en ligne le 27 Juin 2012