Fiscalité

[Tribune] Expatriés : bien gérer son patrimoine pour bien protéger sa famille

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Actuellement, près de 3,5 millions de Français vivent à l’étranger. Si les raisons d’un départ sont multiples (études, travail, retraite, etc.), il est important de bien le préparer en amont. En effet, une expatriation peut avoir de nombreuses conséquences sur les plans civil, juridique, fiscal et successoral. Explications.

 

 

 

 

 

 

Selon les données du ministère de l’Europe et des Affaires étrangères, en 2024, le nombre d’expatriés a augmenté de 2,8 % par rapport à 2023. Un chiffre en progression qui s’explique en partie par le report de projets familiaux ou professionnels dû à la pandémie.

Loin d’être réservée à une génération en particulier, l’expatriation concerne aussi bien les jeunes que les moins jeunes. En effet, près d’un quart ont moins de 18 ans, tandis que 16 % ont plus de 60 ans. Les jeunes adultes et les familles sont également bien représentés : 22% de la population expatriée à entre 26 ans et 40 ans et 29 % entre 41 ans et 60 ans. Côté destination, l’Europe et les pays du G20 sont privilégiés.

Des critères variables pour la résidence fiscale...

Célibataire ou marié, avec ou sans enfant, locataire ou propriétaire de sa résidence principale, etc. : sur le long terme, l’expatriation peut avoir un impact significatif sur la gestion de son patrimoine et la protection de sa famille. Et ce, sans compter tous les changements pouvant intervenir lors de l’expatriation : mariage mixte, prolongation du séjour, changement de destination, divorce, décès. Dans ces conditions, il est essentiel avant le départ ou une fois sur place, de bien se renseigner sur les nouvelles règles qui s’appliquent.

En France, les personnes considérées comme résidentes fiscales sont imposées sur l’ensemble de leurs revenus mondiaux. En revanche, les non-résidents sont imposés uniquement sur leurs revenus de source française.

Les critères de résidence fiscale pouvant varier d’un pays à l’autre, il est possible de se retrouver dans une situation de double imposition. En effet, selon l’article 4 B du Code général des impôts (CGI), une personne est considérée comme résidente fiscale si elle remplit l’un des critères suivants : avoir son foyer ou, à défaut, son lieu de séjour principal en France, y exercer son activité professionnelle principale ou y avoir le centre de ses intérêts économiques.

Ainsi, les conventions fiscales visent ainsi à éviter la double imposition en répartissant les droits d’imposition selon la nature des revenus (immobiliers, mobiliers, dividendes, plus-values, etc.). Il est donc essentiel de vérifier qu’une convention fiscale bilatérale existe entre la France et le pays de résidence afin d’éliminer la double imposition. A ce jour, 121 conventions fiscales ont été signées par la France et un autre Etat.

... Comme au plan matrimonial...

Sur le plan matrimonial, la loi applicable peut varier en fonction du pays de résidence, ce qui peut entraîner des conséquences sur la répartition des biens en cas de divorce ou de décès. Depuis l’entrée en vigueur du règlement européen de 2016, signé par 24 pays, lequel s’applique aux mariages célébrés à partir de 2019 sans contrat de mariage, le principe de loi unique s’applique. Le régime matrimonial est régi par la loi de l’Etat de la première résidence habituelle commune des époux après le mariage.

Pour les mariages célébrés entre 1992 et 2019 toujours sans contrat de mariage, ce même critère de la première résidence commune s’applique également, mais avec une particularité : le régime matrimonial peut évoluer dans trois situations, entraînant une mutabilité du régime matrimonial.

Cela peut se produire si les époux s’installent dans un pays dont ils possèdent ou acquièrent la nationalité commune, s’ils résident pendant dix ans dans un même État, ou s’ils n’avaient pas de résidence commune auparavant. Par exemple, en France, sans contrat de mariage, les biens sont automatiquement soumis au régime légal de la communauté réduite aux acquêts tandis qu’au Royaume-Uni, le régime qui s’applique est en séparation de biens. Il est donc important d’anticiper ses changements avant une expatriation.

... Ou sucessoral

De même, sur le plan successoral, depuis l’entrée en vigueur le 17 août 2015 du règlement européen sur les successions internationales qui permet désormais d’harmoniser les règles, signé par 19 pays, c’est la loi de la dernière résidence habituelle du défunt qui régit l’ensemble de la succession, sans distinction entre les biens meubles (comptes bancaires, etc) et immeubles (biens immobiliers). Pour les résidents de pays non signataires de ce règlement, où le principe de la scission s’applique, différentes lois peuvent s’appliquer en fonction de la nature et de la localisation du bien. Afin d’éviter un risque de morcellement de la succession, il s’agira de définir la loi nationale devant s’appliquer au décès par professio juris (testament).

Ainsi, il conviendra donc de bien préparer son expatriation car un changement de résidence principale peut avoir un impact significatif sur les plans juridique, civil et fiscal.