Les avocats de la société de gestion et de ses tiers de confiance ont plaidé le 1er juillet pendant de longues heures la nullité de l’action du Collectif Porteurs H2O devant le tribunal de commerce de Paris. A l’appui de leur demande, ils invoquent la constitution atypique des demandeurs et la sollicitation des porteurs de parts effectuée par Deminor, pointée comme un démarchage illicite.
Cela fait maintenant plus d’un an que les audiences ont commencé pour le Collectif Porteurs H2O et les multiples parties défenderesses dans l’affaire des fonds cantonnés, dont certaines ont depuis rejoint le litige par intervention forcée : H2O AM LLP, H2O Europe SAS, H2O AM Holding, Natixis IM, KPMG Audit IS, Caceis, Ostrum AM, KPMG SA, Natixis et sa maison mère BPCE.
Premières plaidoiries
Après des mois de reports d’audiences - dont celle du 24 juin, ajournée en raison d’une coupure d’électricité au tribunal de commerce de Paris -, les premières plaidoiries de cette armada de conseils ont pu se tenir le 1er juillet, cinq heures durant.
Il ne s’agissait cependant pas de débattre du fond de l’affaire, mais d’étudier de façon préalable les exceptions de procédure, « in limine litis ». Et c’est bien toute la nullité de la procédure qu’H2O et les autres sociétés mises en cause ont demandé, faisant valoir une atteinte à l’ordre public de direction - destiné à protéger l’intérêt général - en raison de mandat de représentation non établis, de leur contenu et d’un démarchage illicite.
Une « initiative conjointe » plutôt qu’une action de groupe
En clair, les arguments portent sur le schéma spécifique adopté par les membres du Collectif Porteurs H2O et de son financement par Deminor, spécialiste du financement des contentieux judiciaires. Les plaignants lésés dans l’affaire des side-pockets sont en effet représentés par Dominique Stucki, associé fondateur du cabinet Legitix, dans le cadre d’une « initiative conjointe et coordonnée de nombreux épargnants victimes », selon la définition de l’avocat.
Il ne s’agit donc pas d’une action de groupe qui impliquerait d’ailleurs pour le collectif de faire partie d’une liste d’associations agréées. Les avocats du gérant britannique soutiennent ainsi que l’action est irrégulière et que l’avocat des porteurs de parts n’est pas en mesure d’établir avec certitude le nombre de plaignants qu’il représente.
Nombre de plaignants incertain
Il faut dire que l’offre d’H2O de sortie des fonds cantonnés a quelque peu brouillé les cartes puisque ses 75 000 souscripteurs sont aussi bien des investisseurs individuels qu’institutionnels.
Selon le Collectif Porteurs H2O, le nombre de plaignants qu’il fédère serait aujourd’hui proche des 9 000 et le préjudice revendiqué de 800 M€. Celui-ci a fait une demande de conciliation pour pouvoir a minima arrêter le périmètre exact des demandeurs, qui n’a pas trouvé preneur parmi les parties opposées à ce stade.
Démarchage commercial ?
Les conseils du gérant britannique estiment également que Deminor, qui n’est pas partie au litige, a sollicité de façon « active et personnalisée » les porteurs de parts pour initier le litige, caractérisant un démarchage commercial, interdit en matière juridique.
« « Ni l’association ni Deminor n’ont procédé à un quelconque démarchage illicite. Un tel démarchage aurait notamment nécessité de connaître la liste des porteurs de titres H2O, qui n’est évidemment pas publique, objecte Gérard Maurin, président du Collectif porteurs H2O. Ces stratégies dilatoires ne sont pas payantes : H2O a pour le moment été condamné à chaque fois dans cette affaire, que ce soit devant le tribunal de commerce en référé, devant la Financial Conduct Authority (FCA) ou l’AMF. »
Délibéré en octobre
Les amendes records de 93 M€ infligées par cette dernière à H2O et ses dirigeants fin 2022 ont d’ailleurs récemment été avalisées par le Conseil d’Etat, qui les estime « proportionnées à la gravité des manquements commis par les requérants ».
Le délibéré sur les vices de procédure devrait « normalement » - des mots des juges du tribunal de commerce - intervenir le 14 octobre. Hasard du calendrier, cela fera cinq ans jour pour jour que les side-pockets ont été constitués.